Qu'est-ce que la post-modernité ?
Définition du concept de la post-modernité
Il s'agit avant tout d'un concept philosophique, d'une étiquette pour évoquer les phénomènes de transformation et d'évolution que nous vivons collectivement, au sein de notre société. Ces changements majeurs ont été portés par de nombreuses voix, notamment françaises. Citons-en quelques-une (liste non exhaustive) :
Michel Foucault, et la notion de "surveillance" ;
Roland Barthes, et l'idéologie "petite bourgeoise" ;
Jean Baudrillard, et le concept de "simulation / simulacre" ;
Guy Debord, et la notion de "spectacle" ;
Michel Maffesoli, et le concept de "tribu" ;
Hartmut Rosa, et son concept d' "accélération du temps";
etc...
Ces penseurs, ont permis de mettre en mots les maux de notre société. Leurs concepts permettent de mieux appréhender les changements de société actuels. Ils ont été visionnaires en formulant leur thèse il y a 10, voire 20, 30 ou 50 ans auparavant ! La plupart caractérisent efficacement le symptôme de "désenchantement du monde".
Penser la « post-modernité » à l’heure de l’entreprise à mission
Dans cet article, je vais surtout développer l'approche du sociologue français Michel Maffesoli. Son oeuvre, basée sur une caractérisation précise de la « post-modernité », est précieuse pour aborder la question des mutations auxquelles doivent faire face les marques et les entreprises. C’est ainsi qu’en plein coeur d’un contexte de défiance, Danone est devenue en mai 2020 la première « entreprise à mission » cotée en Bourse.
Le sens de l’Histoire ? Il se trouve que les travaux du sociologue nous permettent de comprendre les impératifs de notre époque, qui obligent les entreprises à communiquer différemment. Ce sont ces nouveaux paradigmes du XXIème siècle que les signes de l’entreprise doivent véhiculer, supports indispensables pour être « entendable » et entendu.
De nouveaux codes dans la communication : déclinaisons graphiques
Pour le sémiologue, il est toujours pertinent d'observer les inclinations post-modernes à travers des manifestations concrètes : signes, symboles, logos, publicités, etc. Si vous souhaitez en savoir plus dans la manière dont les logos évoluent ces dernières années, vous pouvez lire cet article ici. Il s'agit de revenir sur les codes graphiques porteurs de cette post-modernité, visibles dans les signes qui nous entourent.
Les 9 caractéristiques de la « post-modernité »
Voici un résumé des 6 caractéristiques essentielles pour caractériser la « post-modernité » telles que formulées par Michel Maffesoli :
1- Tribalisme (versus Individualisme)
On passe du « je pense donc je suis » (Descartes) au « je est un autre » (Rimbaud). L’individu n’est plus au centre d’une République une et indivisible : c’est l’idéal communautaire qui prend le relais.
2- Créativité (versus Travail)
Le travail n’est plus un impératif catégorique (Kant) pour se réaliser. C’est faire de sa vie une oeuvre d’art, et en tous les cas, ne plus perdre sa vie à la gagner qui a du sens et qualifie l’existence.
3- Remagification (versus Technicisme)
Les réponses systématiques et purement rationnelles pour organiser et structurer le monde laisse place à une « remagification » du monde (Benjamin Walter). Une vision hollistique du monde s’impose.
4- Esthétisation (versus Utilitarisme)
On quitte une représentation utilitariste du monde (ne vaut que ce qui sert (paranoïa). On valorise une vision esthétique et émotionnel : corps-esprit-environnement sont liés (épinoïa).
5- Présentéisme (versus Futur sublimé)
Le futur n’est plus un enjeu de sublimation, ou envisagé comme un report de jouissance (Freud). C’est le primat du présent dans son immédiateté et de l’instant éternel...
6 – Relativisme (versus Vérité)
La verticalité de la « Loi des Pères » (détenir La Vérité) laisse place à l’horizontalité des Vérités plurielles, mises en relation les unes par rapport aux autres. C’est l’ère du relativisme : les points de vue coexistent.
Quelques ajouts sur la communication et les signes
Je me permets, au vue de mon expérience professionnelle, d'ajouter deux autres paradigmes à cette liste très fructueuse :
7- Hybridation (versus Cloisonnement)
Notre imaginaire regorge de ces figures hybrides : Minotaure, Centaure, Sirène, Sphinx, peuplent nos représentations. Mythologiques et archétypales, ces figures "mélangées" seraient à associer, selon Jung, à une évolution du Soi.
En tous les cas, l'évolution des comportements nous invite à nous interroger sur ce phénomène d'hybridation et de trans-" à travers des phénomènes observables à échelle mondiale. La maniefestation trans- polymorphe, fluctuant et synchrone (transgenre, transidentité, transracialisme...). Lire l'article complet sur ce sujet ici.
8- Authenticité (versus Consistance)
Dans mon dernier ouvrage, Anti Bullshit, j'évoque ce phénomène bien connu des psychologues : la dissonance cognitive, lorsque nos comportements et nos valeurs ne sont plus alignés. De manière davantage visible encore, un Sujet peut dans une même journée dire tout et son contraire sans que cela remette en cause sa légitimité. Exemple détaillé dans le livre de la gestion des masques par le gouvernement et ses déclarations. Comme le rappelle Gilles Lipovestky, ce qui compte c'est moins la Vérité que l'Authenticité.
9 - L'inversion des valeurs (Etre versus Avoir)
Enfin, il semble notable qu'au-delà du phénomène d'hybridation évoqué ci-dessus, nous assistons à une véritable inversion des valeurs. Pour ceux que cela intéresse, j'ai développé cet aspect dans mon dernier ouvrage, "Anti Bullshit". J'y analyse, notamment, la publicité "Sauvage" de Dior avec Johnny Depp grâce à l'apport de Joseph Campbell sur le parcours héroïque. J'y démontre la confusion patente entre "l'être" et "l'avoir". Cette confusion est visible dans la plupart des publicités, jusque dans les discours politiques. Lorsqu'Emmanuel Macron déclare « Dans les gares, il y a ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien », il confond bien entre les deux auxiliaires.