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Une lecture symbolique du nouveau reliquaire de Notre Dame de Paris à travers signes, symboles et mythes

Photo du rédacteur: elodieelodie

J'avais envie de partager avec vous une interprétation possible de ce nouveau reliquaire, qui a tout de même fait parler de lui. L'occasion, pour moi, de vous faire plonger dans l'univers passionnant des signes et des symboles. Vous retrouvez la vidéo de mon intervention en fin d'article (durée : une vingtaine de minutes)


L'"Ancien" Monde ou l'histoire du reliquaire de Notre Dame


Le reliquaire de Notre-Dame de Paris, avant sa destruction partielle lors de l'incendie de 2019, était l’un des trésors les plus précieux de la cathédrale. Conçu pour abriter les reliques les plus sacrées du christianisme, notamment la Sainte Couronne d’épines, il témoigne de la dévotion des rois de France et de l’importance spirituelle de la cathédrale au fil des siècles. Commandé sous Louis IX, qui avait acquis la Couronne d’épines en 1239, le reliquaire fut initialement conservé dans la Sainte-Chapelle, avant d’être transféré à Notre-Dame après la Révolution française.


Durant le XIXe siècle, sous l’impulsion du cardinal de Noailles et plus tard du baron de Guilhermy, un nouveau reliquaire fut conçu pour accueillir les précieuses reliques dans un écrin digne de leur importance. Réalisé en or et en cristal de roche, il incarnait l'esthétique néo-gothique chère à l’époque. Ce reliquaire, exposé lors des grandes célébrations liturgiques, constituait un point d’attraction majeur pour les fidèles et les visiteurs. Heureusement, lors de l’incendie de 2019, il fut sauvé des flammes grâce à l’intervention rapide des pompiers et du personnel de la cathédrale.


L'Ancien reliquaire de Notre Dame, de style gothique flamboyant, chef-d'œuvre d'orfèvrerie religieuse, dessiné par Eugène Viollet-le-Duc et réalisé par Placide Poussielgue-Rusanden 1862.
L'Ancien reliquaire de Notre Dame, de style gothique flamboyant, chef-d'œuvre d'orfèvrerie religieuse, dessiné par Eugène Viollet-le-Duc et réalisé par Placide Poussielgue-Rusanden 1862.

L'objet met en avant une forte symbolique chrétienne. Les statues représentant des saints (et / ou des saintes ?) encadrent la base. Le style artistique témoigne de l’apogée du gothique tardif, avec une emphase sur la verticalité et la lumière. La couronne supérieure, décorée de fleurs de lys, symbolise la monarchie française et le rôle du roi comme protecteur des reliques sacrées.


La structure complexe mais harmonieuse est caractéristique des objets liturgiques de cette époque, où l’art servait à magnifier la foi et à refléter la puissance divine. L’utilisation d’or et de pierres précieuses met en avant l’idée de trésor céleste, rappelant la richesse spirituelle qu’il représente..


Le "Nouveau" Monde ou comment le reliquaire parle de notre époque et de nous-mêmes


Bien que l’ancien reliquaire ait été sauvé des flammes, la reconstruction de la cathédrale et l’émergence d’un projet renouvelé pour son patrimoine ont conduit à une réflexion sur la manière d’exposer et de conserver ses reliques. L’objectif était de concevoir un écrin qui ne soit pas seulement un objet liturgique, mais aussi une œuvre d’art contemporaine capable de dialoguer avec l’esthétique de notre époque. De ce point de vue, vous allez le découvrir, c'est réussi. Comme je vais vous le présenter, le nouveau reliquaire symbolise le passage de la Loi des Pères au Contrat des Mères.


Le choix de matériaux modernes tels que le cristal de roche et l’acier doré symbolise une rupture avec l’ornementation baroque et néo-gothique de l’ancien reliquaire. Cette nouvelle approche met davantage l’accent sur la lumière et une simplicité formelle. Finalement l’attention porte davantage sur la relique elle-même plutôt que sur son contenant.



Nouveau reliquaire de Notre Dame réalisé par l’orfèvre Goudji en 2020,
Nouveau reliquaire de Notre Dame réalisé par l’orfèvre Goudji en 2020,

Le reliquaire prend la forme d’un disque monumental doré, dont la surface est composée de centaines de cavités ou niches, évoquant une mosaïque circulaire. Au centre, un cercle bleu profond attire immédiatement l’œil, créant un point focal renforcé. La base en marbre simple et épurée soutient l’ensemble, renforçant l’aspect intemporel de l’installation. Cette structure géométrique s’éloigne des reliquaires figuratifs classiques pour privilégier une approche abstraite.


L’absence d’iconographie explicite place l’accent sur l’essence de la relique et l’expérience qu’elle suscite, plutôt que sur la narration historique ou religieuse. Ce reliquaire suscite également des débats sur la place de l’abstraction dans le patrimoine religieux.


Le sens caché du nouveau reliquaire : une lecture symbolique


Je vous laisse maintenant découvrir l'application d'une lecture symbolique à ce reliquaire. Rappelons simplement quelques postulats de la lecture symbolique :

  • Elle complète l'analyse sémiologique, tout en s'en différenciant : de ce point de vue là, l'analyse symbolique se rapproche davantage des travaux de Carl Gustav Jung, plutôt que de ceux de Roland Barthes ;

  • L'analyse symbolique présuppose que le sens est mystérieux et universel : de ce point de vue là, le sens nous pré-existe, il n'est pas que présent en langue ;

  • Le sens a son propre langage : ce sont les symboles : de ce point de vue là, les symboles sont un pont entre le monde terrestre et le monde imaginal tel que décrit par Henry Corbin :

La tradition philosophique occidentale, rappelle-t-il, a souvent mis en accusation la faculté de l’imagination. L’idée que l’imagination puisse être « active », « agente », ou encore qu’elle ait une fonction cognitive propre était inenvisageable. La ligne de démarcation entre philosophie et poésie, monde réel et monde fictif, raison et imaginaire était inamovible». Or selon Henry Corbin, l’imaginaire nous donne justement accès à une région et une réalité de l’être qui sans lui nous reste fermée et interdite. Cynthia Fleury poursuit : « En d’autres termes, il s’agit de défendre l’imagination comme une faculté d’accès à la réalité, à plus de réalité, comme si la faculté imaginale était la seule à pouvoir révéler le monde dans toutes ses densité et complexité éventuelles (…). Désormais ceux qui continueront de confondre imagination et imaginaire le feront à leurs propres dépens intellectuels. La faille se situera de leur côté.»
(...)
Selon Henry Corbin, la vérité ne s’oppose pas à la fiction puisque la vérité se raconte. L’histoire imaginale est une philosophie narrative. Par ailleurs le philosophe nous met en garde : « enfermer l’imagination dans le carcan de l’imaginaire n’est donc pas sans conséquences sur l’itinéraire des âmes (…).
En ce sens, le désenchantement moderne n’est pas lié au manque d’imaginaire mais au manque d’imaginal (…). » L’imaginaire permet l’inclusion du moi dans le monde : « Entre l’image et le réel s’établit comme un double rapport, un circuit qui épaissit le sens même du réel et permet une insertion réciproque entre le monde et moi» C’est parce qu’il y a un fond imaginal commun, que la petite histoire s’inscrit dans la grande histoire.
Extrait du livre Anti Bullshit, p225.

Enfin, ajoutons que les mythes ne sont pas que des histoires pour faire dormir les enfants, mais bien une puissance créatrice au service de la connaissance de Soi,




 
 
 

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